(M) SOMERHALDER ● Savoir qu'on n'a plus rien à espérer n'empêche pas de continuer à attendre.

Il pleuvait des cordes. A vrai dire, il pleuvait depuis déjà deux jours. Les informations avaient lancé une alerte aux crues. C’est sans doute ce qu’il a poussé à prendre la voiture pour aller vérifier le garage de maman et papa, savoir s’il était toujours debout et si de l’eau n’était pas rentré à l’intérieur. Les médecins ne m’ont pas dis s’il avait eu le temps d’arriver jusqu’au bout. Je ne sais même pas comment cet accident est arrivé au juste. En tout cas, j’étais à l’extérieur, à courir. Les gouttes d’eau perlaient sur mon visage, à la recherche d’une chute certaine. Mais il y avait aussi les larmes qui coulaient le long de mes joues ; à la recherche, elle, d’un chagrin bien présent. Il n’y a personne dans les rues ; les autres ont entendu l’alerte et ont probablement préféré rester chez eux. Une fois la porte passée, je me dirige directement vers l’accueil pour demander le numéro de sa chambre. Malheureusement, il n’a pas de chambre à lui pour le moment puisqu’il est justement entrain de se faire opérer. Quand je demande de quoi il s’agit, l’infirmière me lance un regard désespéré qui veut déjà tout dire. Je la remercie, tente de garder mon calme et prend place dans un de ces fauteuils qui ont l’air si confortables mais qui, dans l’attente d’une nouvelle quelconque, deviennent tout le contraire. Mes yeux sont figés sur l’horloge au-dessus des divers distributeurs. C’est à peine si je suis capable de les cligner et je ne me souviens pas non plus quand a été la dernière fois que j’ai respirée. Le corps crispé, je suis incapable de faire un geste de plus, même quand la jeune femme à côté de moi m’annonce que son fils est sorti d’affaire, qu’elle va pouvoir le revoir très bientôt ; grâce à un donneur. Je me permets tout de même de lui offrir un sourire bien que le cœur n’y est pas. Pas cette fois dans tous les cas. « Mademoiselle Hawkes ? » Je vis un homme en blouse blanche venir près de moi, la mine fatiguée et le visage tirée par une mauvaise nouvelle. « Comment va mon frère ? » Il positionna sa main de façon à ce que je comprenne qu’il fallait que je m’asseye. Tout cela n’annonçait rien de bon, j’en avais bien peur. « Nous avons fais tout ce que nous pouvons. Maintenant, tout dépend de votre frère. Avant son opération, nous l’avons plongé dans le coma pour qu’il ne puisse pas ressentir la douleur. Nous avons terminé depuis une heure et il ne s’est toujours pas réveillé. Il est fort possible qu’il ne se réveille jamais. » Ce médecin m’annonçait cela avec une impartialité déconcertante, comme si ce n’était pas la plus mauvaise nouvelle de l’année. Alors, les seules fois où je verrais mon frère, il aura les yeux fermés, la mine crispé et je ne pourrais plus jamais voir son visage qui me réconfortait bien souvent. Je tombai en sanglots, incapable de me retenir plus longtemps. « Ce n’est pas possible, ce n’est pas possible. » Je répétai cela pendant environ une minute avec que le médecin pose ses mains contre mes épaules et me prenne dans ses bras. Peu importe qu’il ne s’agisse que de son boulot, l’attention comptait plus que le reste. « Il reste tout de même des chances pour qu’il revienne. Mais il faut savoir qu’elles sont minces. » Je n’en doutais pas. J’ignorais d’ailleurs, si j’étais entrain d’espérer le revoir un jour, les yeux ouverts. Le jeune homme resta encore quelques instants à mes côtés, en silence, une main posée contre la mienne comme si c’était le geste le plus normal du monde. Finalement, il tourna son visage près du mien, tentant de sourire. « Vous avez envie de quelque chose ? Boire un café ou bien, je ne sais pas. » « Je veux bien oui. » Il m’expliqua qu’il devait s’absenter un instant pour aller ranger et récupérer ses affaires par la même occasion. Je n’avais pas nécessairement besoin de la pitié de qui que ce soit, mais si ça pouvait aussi me changer les idées, je ne pouvais guère refuser. Quelques minutes plus tard, il revint. Cette fois-ci, il faisait beaucoup plus normal. Comme moi. Je me leva immédiatement puis nous primes le chemin jusqu’au café du coin.